Le 10 Janvier dernier, la BCE a décidé, comme au mois de décembre, de laisser son taux directeur inchangé. Ainsi, entre le ralentissement économique et les risques inflationnistes, Francfort a choisi la prudence.
A l’inverse, la Fed devrait mettre de côté ses appréhensions sur l’inflation pour ramener progressivement son taux de 4,25 à 2,25% afin d’éviter la récession, certes modérée selon les prévisionnistes, qui devrait toucher l’économie américaine mais aussi probablement l’économie japonaise du fait de la faible consommation. Cette baisse des taux outre-atlantique devrait être conjuguée avec d’autres mesures, dont un crédit d’impôt et la baisse de la retenue à la source sur les salaires, qui seront annoncées par le président Bush lors de son discours sur l’état de l’Union.
Bien que la Fed semble focaliser sur la croissance, le risque inflationniste, certes exagéré à Francfort, n’en demeure pas moins certain. Pour preuve, la hausse du prix de l’or. Mardi 8 Janvier, le cours de l’once a frôlé un sommet historique de 900 dollars. Depuis août, le cours de l’once a crû de 35%, principalement à cause de la baisse des taux aux Etats-Unis et outre-manche qui pourraient accentuer les tensions inflationnistes. Contrairement à l’or noir, l’or est généralement signe de crainte monétaire. Les investisseurs, n’ayant plus confiance dans le marché obligataire, voient en lui l’ultime rempart contre l’inflation. Depuis le dernier pic de 1980, les investisseurs avaient généralement retrouvé confiance dans la capacité des banques centrales à garder les prix sous contrôle.
Cependant, les autorités britannique et américaine semblent pour le moment plus préoccupées par la croissance que par le maintien de la stabilité des prix ce qui justifie les craintes des investisseurs. De son côté, la BCE redoute les effets de second tour, c’est-à-dire un emballement des prix nourris par les salaires, alors que débutent en Allemagne les négociations salariales pour les fonctionnaires et les communes avec des syndicats très offensifs, réclamant jusqu’à 8% d’augmentation. La BCE a déjà mis en garde contre une indexation des salaires sur les prix alors que la hausse des prix de l’énergie et des produits agricoles a provoqué un regain d’inflation. Selon les analystes, Francfort devrait pouvoir tolérer un ou deux semestres en dessous du potentiel pour atténuer l’inflation avant de commencer une baisse des taux.
Pour l’instant, le ralentissement de la croissance et le recul de la confiance lui interdisent de relever ses taux et l’accélération de l’inflation, qui a atteint 3,1% sur un an dans la zone euro en décembre, soit son plus haut niveau depuis six ans et demi, l’empêche de baisser le prix de l’argent comme le suggèrent les gouvernements inquiets de la langueur de leurs économies et du mécontentement de leurs électeurs.