La réunion des « Grands » de ce monde défraye généralement la chronique à cause de l’agitation des mouvements altermondialistes. Excepté l’énoncé de belles promesses sur le changement climatique, la gouvernance des entreprises ou encore la réduction de la pauvreté, rien de concret ne sort généralement de ce cénacle économique et politique qu’est annuellement Davos.
Cependant, ce 38ème forum mondial s’est ouvert en pleine période de crise financière générée par les subprimes qui commence à se répandre dans toute l’économie. De quoi rendre cette rencontre un peu plus stimulante. Il en ressort deux propos principaux que nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer dans des billets précédents. D’une part, la gouvernance monétaire des banques centrales, sont particulièrement pointées du doigt la Banque Centrale Européenne et la Réserve Fédérale, est violemment critiquée dans la gestion de l’actuelle crise financière. D’autre part, nombre d’experts s’accordent désormais à constater une translation de la puissance financière de l’Occident vers l’Asie.
La plupart des participants s’accordent sur le fait que l’Amérique n’est pas pour le moment entrée en récession, contrairement aux propos d’Alan Greenspan. Cependant, comme l’a rappelé l’économiste Nouriel Roubini,le coup de frein qui frappe la croissance américaine ne devrait pas laisser indemne les autres économies car les Etats-Unis ne sont pas les seuls à souffrir d’une bulle immobilière. Elle existe, dans une moindre proportion certes, en Irlande, en Espagne ou encore au Royaume-Uni. Un tel pessimisme n’est cependant pas l’apanage de la majorité. Ils s’accordent néanmoins à critiquer la gestion de la crise actuelle par les autorités monétaires.
Stephen Roach, analyste de Morgan Stanley, a ouvert la charge en s’interrogeant sur l’opportunité de la dernière baisse du taux de la Fed qui semble avoir été dictée par un souci de « faire plaisir aux marchés financiers ». Et de conclure : « Avec cette politique d’ajustement par excès de liquidité, on va continuer d’aller de bulle en bulle ». Le Prix Nobel Joseph Stiglitz, l’ancien secrétaire au Trésor Lawrence Summers et le directeur général de l’OCDE Angel Gurria l’ont tous rejoint. Les seuls voix discordantes étaient celles de l’ancien banquier central Jacob Frenkel et de John Snow pour qui la dernière décision de la Fed avait surtout pour but d’envoyer un message clair aux marchés : « Il y a un pilote dans l’avion ».
Par ailleurs, les représentants des pays émergents se sont évertués à souligner le nouveau rapport de force. Kamal Nath, le ministre du Commerce et de l’Industrie indien, a rappelé que même si les Etats-Unis demeurent un partenaire commercial important, leur premier partenaire est la Chine. Par conséquent, même si récession outre atlantique il devait y avoir, elle n’aurait pas le même impact qu’auparavant. Ainsi, le centre de gravité économique et commerciale continue de se déplacer vers l’Asie. Ironie du sort, d’après les analystes, les pays émergents, qui totalisent la moitié de l’économie mondiale, devraient sauver la croissance mondiale pour 2008.