Les économistes avaient coutume de dire que lorsque les Etats-Unis éternuaient, l’Europe s’enrhumait. Vu les récentes évolutions du marché des changes, ils commencent juste à revoir leur jugement.
En effet, alors que la première économie mondiale s’enfonce progressivement dans la crise, les économies européennes, particulièrement de la zone euro, semblent au contraire faire preuve d’une certaine résistance.
Comme l’a reconnu lors de son audition biannuelle devant le deux commissions du Congrès américain le président de la Réserve Fédérale, les mauvais indicateurs économiques s’accumulent outre-atlantique. Cette période d’incertitude pour l’économie américaine a eu un impact direct sur le marché des changes jeudi dernier en faisant atteindre à l’euro un sommet historique de 1,5105 dollar. Face à la faiblesse de la croissance outre-atlantique, et en dépit des risques inflationnistes qui pointent, la Réserve Fédérale, en accord avec l’administration Bush, a laissé entendre qu’elle serait forcée de procéder de nouveau à une baisse des taux lors de la réunion du mois de mars. En à peine cinq mois, la Réserve Fédérale a déjà ramené ses taux directeurs de 5,25 à 3% alors que ceux de la Banque Centrale Européenne stagnent à 4%.
Ce décalage de politique monétaire s’explique par la résistance apparente de la zone euro à la crise et à la menace d’une récession outre-atlantique. En effet, les chiffres du baromètre IFO, qui mesure le moral des chefs d’entreprise allemands, illustre parfaitement cette résistance. Au mois de février, le baromètre est remonté à 104,1 points après avoir baissé à 103,4 points en janvier.
Cependant, ce découplage de politique monétaire de part et d’autre de l’Atlantique a pour conséquence d’amplifier le renchérissement de l’euro par rapport à la devise américaine.
Certes, l’envolée de l’euro atténue les tensions inflationnistes et a une légère incidence sur le pouvoir d’achat en permettant aux ménages d’acheter moins cher les produits importés, mais elle s’accompagne surtout de nombreux effets pervers. En particulier pour le commerce extérieur. Face à ce problème, tous les pays de la zone euro ne sont pas armés de la même manière. L’Allemagne, dont l’industrie est spécialisée dans la fourniture de biens d’équipements destinés aux pays asiatiques qui connaissent une forte croissance économique, est particulièrement compétitive et peut faire face à un euro fort. En revanche, la France, l’Italie et l’Espagne sont bien moins armés pour résister sur le long terme à la croissance de l’euro sur le marché des changes.
L’aggravation du déficit commercial record de la France au cours de l’année 2007, à plus de 39 milliards d’euros, en témoigne.