L’aversion croissante pour le risque des traders a nettement favorisé la devise nippone cette semaine sur le marché des changes face aux autres devises. Le yen s’est notamment considérablement renforcé face au dollar et surtout à la monnaie unique européenne, forçant notamment le seuil de 150 yens pour un euro en milieu de semaine.
En raison de la détérioration des perspectives économiques mondiales, les investisseurs tendent fortement à chercher des placements sûrs d’où la forte volatilité qui a marqué le cours de la plupart des devises cette semaine sur le marché des changes.
Un tel contexte est généralement favorable au yen dont le faible taux d’intérêt attire les investisseurs. En effet, afin de limiter leur exposition au risque, ils cherchent à se débarrasser de leurs monnaies « fortes », notamment les dollars australien et néo-zélandais, afin de les convertir dans des monnaies « faibles », au premier plan le yen, dont la valeur évolue en fonction de la demande. La décision de la banque centrale néo-zélandaise de baisser d’un demi point de pourcentage son taux a évidemment amplifié ce mouvement.
Ainsi, le yen a retrouvé son statut de valeur refuge en temps de crise, ce qui explique notamment que l’annonce d’une contraction plus forte que prévu au deuxième trimestre de l’économie japonaise n’a eu strictement aucun impact sur le taux de change du yen.
Toutefois, cette ruée sur le yen pourrait poser à terme problème en raison de la dégradation importante de l’économie de l’archipel. Il faut se rappeler en effet que le dernier sommet de la devise nippone face au dollar, le 19 avril 1995, à 79,75 yens pour un dollar, avait considérablement accentué la dégradation de l’économie au Japon, qui subissait alors de plein fouet l’éclatement de la bulle spéculative immobilière des années 80.
La devise européenne n’a pas seulement baissé face au yen mais également face au dollar, en évoluant en dessous de 1,40 dollar, à la plus grande satisfaction de Christine Lagarde. L’annonce d’une révision à la baisse des perspectives de croissance dans la zone euro, et notamment l’annonce d’une probable récession en Allemagne, première économie de la zone, et en Espagne, a affolé les investisseurs qui ont liquidé massivement leurs positions en euro.
Le dollar a largement profité du renforcement des inquiétudes dans la zone euro, en dépit du feuilleton à rebondissement autour de la banque d’affaires de Wall Street, Lehman Brothers, qui peine apparemment à trouver acquéreur. Après avoir annoncé de nombreuses cessions d’actifs dans le milieu de la semaine, le Trésor américain s’est emparé du dossier, envisageant de boucler les discussions avec les investisseurs privés intéressés par un rachat d’ici à la fin du week-end. Toutefois, la pression n’est pas totalement retombée sur le dollar puisque les acteurs du marché des changes ne cachent pas leur nervosité quant à l’annonce des résultats des principales banques américaines la semaine prochaine. Des résultats plus mauvais que prévu pourraient mettre sous pression la devise américaine.