Mardi dernier, le premier ministre libéral, Donald Tusk, a renoncé à fixer une date pour l’adoption de la monnaie unique européenne. Jusque là, la date butoir de 2012 avait été avancée par le gouvernement. Cependant, dès juillet, le ministre des finances polonais avait émis des doutes sur le respect du calendrier par Varsovie. En effet, la crise économique est passée par là.
Certes, la Pologne semble s’en sortir nettement mieux que les autres pays d’Europe Centrale et Orientale. Il suffit de regarder les chiffres : alors que les pays de la zone euro et les pays postulants ont tous connu une récession, la Pologne pourrait l’éviter pour l’année 2009 et même connaître une hausse du PIB de 1%, contre 4,9% en 2008. Certes, c’est une croissance atone que semble expérimenter Varsovie mais un tel score est toujours mieux que la dégringolade de 4% du PIB de la zone euro. Même si la France et l’Allemagne ont renoué avec la croissance au deuxième trimestre, ce n’est pas le cas de tout le monde, notamment de l’Espagne et des Pays-Bas.
Un vent d’optimisme mais également de sagesse s’est alors emparé de la Pologne, faisant de celle-ci le bon élève de l’Europe. En fait, plusieurs facteurs expliquent que la Pologne a bien résisté à la crise. D’abord, il faut attribuer ce succès polonais à un homme : Leszek Balcerowicz. Ancien patron de la banque centrale polonaise, il a permis l’adoption d’un comportement macroéconomique vertueux en Pologne. Le déficit public et la dette publique ont été très bien contenue, même sous les gouvernements dispendieux. De plus, dès 2004, soit bien avant les prémices de la crise, la banque centrale a mis en garde les banques de crédit contre les emprunts en devises étrangères, notamment en euros ou en francs suisses. Cette formule fut très à la mode en raison des taux élevés des monnaies nationales d’Europe de l’Est. Dans les pays baltes, qui ont succombé à cet effet de mode, les répercussions de cette formule furent dévastatrices, étranglant les économies. Enfin, la Pologne reste un pays qui est moins ouvert que ces voisins ce qui explique que la chute du commerce international se soit moins répercuté sur le dynamisme de l’économie polonaise. A titre d’exemple, les exportations représentent en Pologne seulement 28% du PIB contre 77% en Slovaquie. Quand bien même les exportations représentent un poste peu important pour la croissance polonaise, elles ont été dopées par la dépréciation du zloty qui a perdu près de 38% face à la monnaie unique européenne, offrant un avantage comparatif indéniable aux entreprises polonaises par rapport à leurs concurrentes.
Dans un tel contexte, la décision de Varsovie de reporter l’adoption de l’euro a été parfois mal interprétée par les observateurs européens. En effet, la décision prise par le gouvernement Tusk semble être plutôt guidée par la sagesse. La Pologne aurait difficilement répondu aux critères de Maastricht mais, surtout, le pays aurait payé l’adoption de l’euro par une hausse dévastrice des taux d’intérêt, pénalisant l’économie polonaise. Comme l’a rappelé le premier ministre « nous devons rester prudents et faire preuve de patience car il est encore trop tôt pour pouvoir annoncer la fin de la crise ».