Depuis la fin du mois d’août, la reprise de l’activité économique mondiale a incité les investisseurs du marché des changes à diversifier leurs avoirs, essentiellement constitués de dollars, de yens et dans une moindre mesure de francs suisses. Le rebond des marchés d’actions et des matières premières a conforté les investisseurs et influé positivement sur le cours du marché des changes. Ainsi, des devises telles que les dollars des antipodes, l’euro mais aussi les devises émergentes telles que le real brésilien ou le shekel israélien se sont considérablement raffermis face au dollar américain.
Le raffermissement de nombreuses monnaies posent cependant des problèmes aux autorités, surtout si l’économie du pays est largement tournée vers l’exportation. C’est notamment le cas d’Israël.
Les vaines tentatives de la Banque d’Israël pour affaiblir le shekel
Afin d’éviter de pénaliser les entreprises exportatrices israéliennes, notamment celles du secteur des hautes technologies, la Banque d’Israël est intervenue plusieurs fois sur le marché des changes au cours des derniers mois afin d’acheter des dollars pour réduire l’envol du shekel. Sa dernière intervention remonte à la semaine dernière lorsque la banque centrale a acheté pour 800 millions de dollar sur le forex. Cependant, tous les économistes ne semblent pas être convaincus par la stratégie adoptée par Stanley Fischer, gouverneur de la Banque d’Israël. Ainsi, le Professeur Avi Ben-Bassat, l’un des meilleurs économistes israéliens, n’a pas caché ses doutes la semaine dernière en affirmant que la banque centrale « ne peut pas changer la valeur du dollar sur le long terme », ajoutant que « ce n’est pas raisonnable ». Bien qu’il se soit efforcé de défendre l’action de Stanley Fischer à la tête de la Banque d’Israël, le ministre des Finances, Yuval Steinitz, a reconnu que l’institut ne pourra pas maintenir sur le long terme sa politique d’achats en grande quantité de dollars.
Une hausse du shekel provoquée par l’affaiblissement du dollar
Le shekel, qui évolue ces derniers jours autour de 3,70 shekels pour un dollar, bénéficie indéniablement d’une situation économique moins désastreuse que dans d’autres pays. Les banques israéliennes ont été relativement peu touchées par la vague des actifs toxiques et, surtout, depuis quelques semaines, les bonnes nouvelles macroéconomiques se succèdent. Cela a conduit la banque Morgan Stanley a révisé à la hausse ses prévisions de croissance pour 2009 et 2010. Au lieu d’une chute du PIB estimée 0,8%, Israël devrait connaître une hausse de 0,2% et en 2010, de 2,7% contre 2,1% lors des prévisions précédentes. De plus, depuis que la Banque d’Israël a relevé son principal taux directeur à 0,75%, les cambistes s’attendent à de nouveau relèvements qui auraient pour conséquence d’accroître la rentabilité du shekel par rapport à de nombreuses autres devises. Pour autant, nombreux sont les observateurs qui affichent leur circonspection. Bien qu’ils ne contestent pas le bon maintien de l’économie israélienne pendant la tempête, ils récusent le mythe du miracle israélien qui affirme qu’Israël a été préservé durant cette période de crise, ce qui justifie la ruée des investisseurs sur le dollar. En fait, ils invitent plutôt à inscrire l’appréciation du shekel dans un contexte plus global : celui de l’affaiblissement généralisé du dollar face à la plupart des monnaies du marché des changes. Comme l’a rappelé le ministre des Finances israélien, le shekel ne fait pas l’objet d’une menace des spéculateurs mais évolue dans le même sens que la plupart des devises du forex en cette période de reprise de l’activité économique mondiale.
Le refus du gouvernement d’intervenir sur le forex
Même si le gouvernement a reconnu qu’il n’existe pas de limite claire à la politique d’achats massifs de dollars sur le marché des changes par la banque centrale, il semblerait qu’il s’oriente vers une non intervention, à l’image du gouvernement japonais. Ce dernier a affirmé, en début de semaine, par la voix de son ministre des Finances ne pas envisager une intervention sur le marché monétaire afin de limiter l’appréciation du yen. Même son de cloche en Israël où un officiel du Trésor a affirmé que « le ministère des Finances n’interviendra pas sur le marché des devises ». En dépit du lobbying intensif de l’organisation patronale israélienne, l’Association des Manufacturiers d’Israël, le gouvernement semble ne pas vouloir céder et s’orienter vers d’autres moyens afin d’aider les exportateurs à faire face à l’appréciation du shekel. De tels propos indiquent clairement un changement d’attitude de la part des autorités israéliennes et de la banque centrale.