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Dubaï: crise d’adolescence de la finance islamique?

Pour beaucoup d’investisseurs, la « grande crise » de 2008 était presque oubliée. Elle s’est rappelée à leur souvenir le 26 novembre 2009. Cette fois, l’étincelle n’est pas venue du marché des « subprimes » mais d’un petit émirat, pauvre en pétrole, Dubaï. Cette crise est-elle pour autant une crise de la finance islamique ?
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Pour beaucoup d’investisseurs, la « grande crise » de 2008 était presque oubliée. Elle s’est rappelée à leur souvenir le 26 novembre 2009. Cette fois, l’étincelle n’est pas venue du marché des « subprimes » mais d’un petit émirat, pauvre en pétrole, Dubaï. Cette crise est-elle pour autant une crise de la finance islamique ?

L’annonce d’un risque de défaut de paiement de Dubaï a provoqué une onde de choc sur les marchés mondiaux. Après avoir baissé en moyenne de 3-4% le jour même, les indices « phares » des principales places financières ont finalement enregistré, sur la semaine, une faible diminution (0,1 – 0,2%). Dubaï n’est pas Lehmann Brothers. Personne n’imagine que l’émirat puisse représenter un risque systémique. Pour autant, les turbulences venues de ce pays ont de quoi inquiéter les investisseurs. Dubaï serait-il le signe avant-coureur des problèmes d’endettement d’autres pays (Cf. Grèce, Italie, Espagne, Irlande, Mexique) où le niveau d’endettement rapporté au PIB est à la limite du supportable ?

Le malheur de Dubaï est que ses actifs, essentiellement immobiliers, se sont effondrés pour cause de mégalomanie. La déconfiture de cet émirat résulte de l’impossibilité du groupe Dubaï World d’honorer ses engagements, constitués d’obligations islamiques (« sukuks »). A la différence des obligations classiques, celles-ci sont adossées à un actif tangible et ne paient aucun intérêt, les investisseurs recevant des coupons correspondant à une part des profits dégagés par l’actif sous-jacent. Pour autant, est-ce la crise d’adolescence de la finance islamique ?

LA FINANCE ISLAMIQUE, WHAT’S THAT ?

En quoi la finance islamique est-elle différente de la finance conventionnelle ? Bien qu’elle soit une forme alternative de sa consœur, elle poursuit les mêmes objectifs en termes de performance financière. Toutefois, si, en finance traditionnelle, la norme qui préside aux décisions financières est l’optimisation du couple risque – rentabilité, la performance n’est pas l’unique, ni le principal critère de décision des opérations islamiques.

La finance islamique moderne a pris son essor dans les années 1990 dans les pays du Golfe. Pour l’heure, cette industrie doit encore faire ses preuves : alors que les musulmans représentent 20% de la population mondiale, moins de 1% de leurs actifs sont investis sur cette classe d’actifs. Elle semble cependant promise à un bel avenir. En effet, depuis quelques années, les banques islamiques se multiplient dans les pays musulmans mais aussi à Londres qui en compte quatre.

Sa spécificité provient du fait qu’elle veille au respect d’un ensemble de règles et de principes dictés par l’éthique musulmane (la charia). L’islam financier se caractérise ainsi par le principe de partage des pertes et des profits, l’obligation d’adosser tout placement à un actif réel, l’interdiction des activités jugées illicites en Islam, la prohibition de l’intérêt (dont le prêt à intérêt) et la spéculation. Pour cela, elle fait appel à des techniques spécifiques de structuration financière.

Mais si la finance islamique est gage de stabilité financière, elle est toutefois porteuse de risques spécifiques, en termes de gestion des liquidités (l’interdiction des intérêts ayant conduit à un développement insuffisant de leurs fonds propres), de risques opérationnels (manque de standardisation des produits financiers) et juridiques (différences d’interprétation de la charia, des normes comptables). De plus, l’interdiction de financer certains secteurs d’activité accroît la concentration des investissements, pouvant contribuer à la formation de bulles, comme l’immobilier dans le Golfe persique.

En dépit de la présence sur son territoire de la plus grande communauté islamique du monde occidental (estimée à près de 6 millions de personnes) et d’une bonne implantation des banques françaises dans les pays musulmans, via des « fenêtres islamiques », la France a un poids négligeable en finance islamique. Tout le paradoxe français est, en effet, contenu dans une inconnue : la demande solvable potentielle pour les produits bancaires islamiques. Il existerait une demande mais pas d’offre, d’où une impossibilité à évaluer l’ampleur des attentes. Aussi, les banques françaises font-elles bien de la finance islamique depuis de nombreuses années… mais en dehors du territoire métropolitain même si aujourd’hui, après s’être concentrées sur le Golfe persique, elles commencent à s’intéresser à un laboratoire aussi idéal qu’inattendu : l’île de la Réunion et sa communauté musulmane. Pourtant, voir bientôt dans les rues l’enseigne d’un établissement offrant des services « halal » aux particuliers n’a rien d’impossible (l’agrément de plusieurs institutions financières islamiques auprès du Comité des Établissements de Crédit et des Entreprises d’Investissement serait en cours). L’enjeu aujourd’hui est de prouver que la finance islamique n’est ni communautaire, ni encline à pourfendre le dogme de la neutralité religieuse. Par son caractère moral, la finance islamique pourrait, en outre, séduire les déçus de la finance traditionnelle du fait de son ancrage dans l’économie réelle. Elle peut donc représenter une alternative pour ceux qui rejettent une sphère financière trop déconnectée de la « réalité ».

DUBAÏ : CRISE D’ADOLESCENCE DE LA FINANCE ISLAMIQUE ?

Alors que se passe-t-il à Dubaï ? La crise actuelle qui s’y déroule n’est pas LA crise de la finance islamique. C’est simplement l’explosion d’une bulle spéculative née d’un surendettement d’un émirat et d’un surdimensionnement des infrastructures dans une conjoncture mondiale déprimée. Pratiquement dépourvu de ressources naturelles, Dubaï n’est pas, d’un point de vue financier, un prêteur potentiel pour les économies européennes, mais un emprunteur. Certes, le marché des sukuks sera ébranlé si ce pays ne rembourse pas sa dette. Le risque de voir l’État incapable de faire face aux difficultés des entreprises qui lui sont liées a déjà conduit à une dégradation des notes attribuées aux dettes de ces compagnies, aggravant ainsi leurs difficultés. Les opérateurs redoutent même que la crise, née dans l’immobilier, ne se propage à d’autres secteurs plus sains de l’économie locale (électricité). Le pays connaît aujourd’hui un véritable « credit crunch » et les entreprises ne peuvent plus se financer. Si la situation ne s’améliore pas, les banques internationales ne vont plus considérer qu’il s’agit du problème de Dubaï World mais plutôt du problème de l’État voire un problème régional.

Toutefois, n’oublions pas deux choses : d’une part, que cet émirat n’a pas le monopole du surendettement et que cette forme de finance, plus vertueuse et plus éthique, comporte aussi des risques et ne doit pas être prise pour ce qu’elle n’est pas : un remède miracle. D’autre part, la vision de la finance islamique comme relais de croissance ne doit pas être remis en cause. C’est pourquoi l’intérêt de la finance islamique pour la France n’a pas de raison d’être affecté par cette crise. La France a plus que jamais besoin de capitaux pour financer sa croissance et préserver ses emplois. Néanmoins, si ce modèle, sans s’imposer comme une alternative totale au capitalisme actuel, offre un mécanisme complémentaire à celui-ci, il n’en demeure pas moins que comme tout système bancaire, ce schéma est soumis à une évaluation et à une révision constantes, dues à l’évolution du système lui-même.

Article intégralement rédigé par MICHEL RUIMY, économiste dans un grand établissement parisien, pour la rédaction de forex.fr

Il a écrit de nombreux articles et ouvrages consacrés à l’économie et à la finance dont La finance islamique en 2008 que vous pouvez commander en cliquant ici.

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