Le locataire de la Maison Blanche, le démocrate Barack Obama, a présenté jeudi dernier un projet de régulation du secteur bancaire américain. C’est la deuxième fois en l’espace de moins de quinze jours que la Maison Blanche présente au Congrès et au public américains des mesures visant directement les banques de Wall Street. Peu de temps auparavant, Barack Obama avait en effet jeté sur la place publique l’idée d’une taxation des banques destinée à renflouer les caisses de l’Etat. Ce projet a été présenté un juste retour d’ascenseur après les milliars investis par le gouvernement fédéral afin sauver les banques et les traders de la faillite.
Un projet 3…en 1
Le nouveau projet de Barack Obama répond à trois exigences du moment. D’abord, les observateurs et commentateurs n’ont pas manqué de remarquer que le projet présidentiel tombe à pic. En effet, un an après son entrée en fonction, le bilan du président sur la scène intérieure et sur la scène extérieure n’est pas reluisant. Guantanamo n’est toujours pas fermé tandis que sa politique de la main tendue envers l’Iran, la Chine ou encore la Corée du Nord peine à porter ses fruits. A l’intérieur, le chômage atteint deux chiffres alors que les banques affichent des résultats presque indécents. La perte historique par les démocrates du siège de Sénateur du défunt Ted Kennedy a rappelé durement à Barack Obama qu’il faut agir avant les élections de mi-mandat. Dans ce contexte, il s’agit de trouver un bouc-émissaire. Celui-ci est tout trouvé en Wall Street, ses traders et ses banquiers qui ont l’indécence d’exhiber leur réussite et leurs bonus alors que la population américaine, le « Main Street », essuie encore les conséquences de la crise.
Outre l’aspect purement populiste de la décision de Barack Obama, il y a aussi une dose de pragmatisme. En effet, bien avant l’aide apportée aux banques, les caisses de l’Etat étaient vides. Sachant les milliards qui ont été injectées dans le secteur bancaire pour le tenir à flot, il ne fait pas de doute que le gouvernement fédéral fait face à une situation budgétaire inextricable. L’idée de mieux réguler les banques pourrait ainsi faire entrer dans les caisses du Trésor un peu d’argent.
Enfin, la troisième raison invoquée, celle qui est probablement la plus essentielle, est le souci du gouvernement d’éviter qu’une nouvelle crise ne puisse émerger, en se basant sur les mêmes errements des dirigeants des banques.
Les mesures principales du projet
Le projet présidentiel tel qu’il a été présenté tourne autour de trois mesures essentielles. D’abord, il s’agit d’éviter que les banques continuent de grossir, sachant que la crise a créé des mastondontes dont la faillite pourrait provoquer un risque systémique. La vague d’acquisitions et de concentration dans le secteur bancaire a pris un tournant important du fait la crise. De plus, le projet présidentiel prévoit d’interdire aux banques d’investir ou d’être propriétaire des hedge funds. Enfin, le dernier point, qui a certainement éveillé le plus le mécontentement de Wall Street, fut la décision d’interdire aux banques de dépôt de s’adonner à la spéculation pour leur propre compte. Cette spéculation, qui est directement à l’origine de la crise économique et financière mondiale, est une activité très risquées des banques mais c’est également la plus rémunératrices, d’où le mécontentement de Wall Street.
Le filtre du Congrès américain
Toutefois, à l’instar de la réforme de l’assurance santé qui est sur les rails au Congrès, ce projet de régulation du secteur bancaire doit d’abord passer le filtre du Sénat où les lobbyistes de Wall Street s’affairent déjà pour édulcorer le projet. Dans l’état actuel de la répartition des sièges, le projet ne devrait pas rencontrer de problème à la Chambre basse mais, du fait de la nouvelle donne au Sénat, de nombreuses tractations devraient avoir lieu à la Chambre haute.