Bienvenue dans la grande foire aux devises, où les billets verts dominent le ring, et les autres monnaies jouent les figurants dépressifs devant une scène américaine en pleine sarabande monétaire.
Commençons par le tableau d’honneur du jour : **le dollar américain**, ce cher vieux billet vert, s’offre un lifting remarquable, regagnant du terrain face à une euro qui prenait des vacances. Après une semaine où les espoirs d’une douce baisse des taux de la Fed faisaient rêver les marchés, un rapport américain sur l’emploi bien tiède, suivi de paroles toujours aussi sibyllines de Jerome Powell, ont jeté un froid : la baisse des taux ne sera ni massive ni imminente. Résultat ? Le dollar se redresse avec un sérieux 75 % de chances désormais donné à une timide baisse de 25 points de base en septembre, contre un rêve précédent à 92 %. Pour les autres, la Banque du Japon garde aussi son costume de dur à cuire avec un relèvement de taux en vue en octobre, histoire de ne pas laisser à l’inflation le monopole du spectacle[1]. Le dollar australien et le kiwi, eux, prennent la vague à contre-courant, glissant doucement vers une semaine négative.
Sur le front géopolitique, rien de nouveau sous le soleil glacial de l’Ukraine : Vladimir Poutine joue le rôle du stonewaller professionnel. Après avoir été reçu avec tapis rouge par Donald Trump à Anchorage, il fait le mort diplomatique. Pire, il délaisse le projet de cessez-le-feu, préférant un silence stratégique où il tatillonne la relation entre Washington et Bruxelles, jouant le rôle du sieur à la citadelle, sourd mais calculateur. Le Kremlin a trouvé son mantra : « paix avec les États-Unis contre chaos européen ». Le cocktail parfait pour maintenir le mouvement brownien des marchés[2]. En prime, un petite piqûre de rappel humanitaire avec la famine officiellement déclarée à Gaza par l’ONU, parfaite pour noircir un tableau déjà fort en tension[4].
En somme, chers traders et curieux de bureau, si la devise européenne s’affaisse, c’est à cause de ces mélanges savamment dosés d’entourloupe monétaire et de tragi-comédie diplomatique. Le vrai suspense, c’est moins la guerre des taux que la guerre des nerfs entre Biden, Trump, Poutine, et qui d’autre ? Pendant ce temps, le Brent flirte gentiment avec les 67 dollars, histoire de rappeler que tout ça coûte cher[5].
Alors, amis lecteurs, pendant que vous frottez votre petite monnaie en vous demandant si votre épargne ne ferait pas mieux d’investir dans des tickets de loterie, je vous pose la question : dans ce grand théâtre des devises et de la diplomatie, qui gagnera le prix du meilleur menteur — et pour combien de temps avant qu’on ne remplace les billets par des bons d’espoir ?