Il est considéré par le président Barack Obama comme le plus à même de prendre la succession de Ben Bernanke à la fin de cette année. Lawrence Summers a indéniablement un CV impressionnant qui plaide en sa faveur: ancien secrétaire adjoint puis secrétaire au Trésor sous Bill Clinton, professeur d’économie à Harvard, université qu’il préside au début des années 2000, et également fin connaisseur du monde de l’entreprise puisqu’il conseille de grands groupes financiers dont Citigroup qui a été pendant de longues années une base arrière des démocrates.
Comme la quasi-totalité des universitaires américains dans les années 90 il avait fortement limité pour la déréglementation des marchés financiers conduisant aux écarts qui ont plongé le monde dans une crise financière sans précédent depuis 1929. Depuis, il a cependant fait son mea culpa, comme d’autres avant lui, et pourrait, aux yeux de certains, être un régulateur financier plutôt rigoureux comme l’est actuellement son ancien collaborateur au Trésor, Gary Gensler, qui a été nommé à la présidence de la CFTC, l’organisme chargé de la régulation des marchés d’instruments financiers dérivés outre-Atlantique. Ses connections avec Wall Street, qui ne sortent en rien de l’ordinaire aux Etats-Unis, pourraient au final constituer un atout certain pour ce candidat déclaré.
En termes de positionnement économique et de politique monétaire, Lawrence Summers est surtout connu dans le monde académique pour un papier qu’il avait écrit en 1991 plaidant avant l’heure pour une cible d’inflation plus importante afin de permettre aux banques centrales d’avoir une meilleure marge de manoeuvre, notamment en période de crise. A l’époque, ce propos était totalement à contre-courant, la forte inflation des années 70 et les errements des banquiers centraux de l’époque étant encore dans tous les esprits. Cependant, de nos jours, une telle vision est totalement d’actualité. D’autres économistes, dont Olivier Blanchard, chef économiste du FMI, ont milité en faveur de cibles d’inflation plus hautes, autour de 4%, avec deux effets positifs: permettre aux banques centrales d’accentuer leurs efforts de soutien à l’économie tout en respectant leur mandat et également alléger le poids de la dette avec un regain d’inflation modéré.
A l’heure où le débat sur la reflation aux Etats-Unis fait surface, mené par Kenneth Rogoff, afin de permettre un ajustement sectoriel plus aisé et un allègement mécanique de l’endettement des ménages et de l’Etat, l’attitude que pourrait adopter Lawrence Summers sera de première importance.
Il devrait prendre ses fonctions à un moment particulièrement crucial pour l’économie américaine puisqu’avant la fin de l’année, il est prévu selon les analystes de marché que la FED commence à abaisser le montant mensuel de ses rachats d’actifs. Un désengagement lent et progressif des mesures non conventionnelles que devra accompagner Lawrence Summers en évitant que l’excès de liquidités dans l’économie ne se traduise par de nouveaux phénomènes de bulle spéculative.