C’est un lundi noir sans précédent, ou presque, qui vient d’ébranler les places financières. Maintenant, il reste à savoir combien de temps il leur faudra pour se relever de la faillite de la quatrième banque d’affaires de Wall Street, Lehman Brothers, qui était depuis des semaines sous le feu de l’actualité, à la recherche désespérée de nouveaux acquéreurs. Le dernier épisode avait peu momentanément rassurer les investisseurs avec la prise en main du dossier par la Réserve Fédérale et le Trésor américain, qui ont à leur tableau le rachat réussi de Bearn Stearns et la mise sous tutelle récente de Fannie Mae et Freddie Mac, les deux géants du refinancement hypothécaire aux Etats-Unis.
Cependant, pour ceux qui ont suivi de près l’actualité, la mise en faillite de Lehman Brothers n’est pas totalement une surprise. En effet, Henry Paulson n’a jamais caché son manque d’enthousiasme quant à la mise en place d’un sauvetage de Lehman Brothers, sur le modèle de celui de Bearn Stearns. En effet, selon ce dernier, la crise des subprimes dure depuis assez longtemps pour que la direction de Lehman Brothers, qui était depuis ces dernières semaines à la recherche de repreneurs, ait eu le temps de se prémunir. Au besoin, Lehman Brothers pouvait, fait-il valoir, s’adresser aux guichets de la Fed qui sont ouverts depuis trois mois.
En rejetant l’hypothèse d’un sauvetage de la banque par de l’argent public, Henry Paulson pariait clairement sur la venue d’un chevalier blanc, un temps vu sous les traits d’une banque sud-coréenne puis sous ceux de Bank of America. Pari perdu puisque la banque, après avoir annoncé au milieu de semaine dernière des cessions massives d’actifs, s’est placé aujourd’hui sous le chapitre 11 de la loi américaine.
Une telle nouvelle a surtout ébranlé le marché des changes qui pariait sur une poursuite de la remontée du dollar face aux autres devises, entamée depuis la mi juillet, sur fond de craintes de récession dans la zone euro.
Cependant, la crainte d’une faillite massive du système bancaire américain, qui a eu pour toile de fond également les difficultés de l’assureur AIG et le rachat de Merrill Lynch par Bank of America, a fait fuir les investisseurs.
La nouvelle de la faillite de Lehman Brothers fut d’autant plus inattendue que la plupart des analystes, encore ce week-end, s’interrogeaient sur le potentiel d’appréciation du dollar sur le marché des devises et sur ses conséquences sur le cours de l’or, qui a perdu près de 29% depuis la mi mars, date de son record historique au dessus de 1000 dollars l’once.
Maintenant, il reste à savoir si les mesures annoncées par la Fed ainsi que par un consortium de banques américaines permettront de rassurer sur le long terme les investisseurs. Pour l’instant, le dollar, après avoir fortement baissé face à la monnaie unique européenne sous le coup de l’annonce, le marché des changes ayant réagi à chaud, a renoué avec la hausse.