Depuis plusieurs semaines, la France est sous pression par les agences de notation, Moody’s et S&P en tête, qui envisagent, dans les prochains mois d’abaisser la note de la dette à long terme du pays, actuellement triple “A”. L’avertissement de S&P hier n’est que le dernier rebondissement d’un épisode qui dure depuis plusieurs semaines pour la France.
Déjà, nombreux sont les économistes, dont Jacques Attali, qui considèrent que la France a perdu son fameux triple “A”, gage de facilité d’emprunts sur les marchés financiers internationaux. La rédaction de forex.fr, dans son ensemble, partage un tel point de vue.
Notation souveraine, what’s that?
Avant d’aborder les enjeux et les conséquences d’une probable baisse de la note de la dette de la France, il faut bien définir le concept de notation souveraine. A l’instar des particuliers, des institutions financières et des entreprises qui doivent chercher des financements pour développer leurs investissements et couvrir leurs dépenses, les Etats doivent s’endetter pour garantir leur fonctionnement. Le coût de ce financement pour les pays varie en fonction de leurs conditions économiques, financières et fiscales.
Les institutions qui décident de la note attribuée, telles que Moody’s, S&P et Fitch, assignent une note à l’économie de chaque pays dans une fourchette qui varie entre D et AAA, par rapport à la qualité de la dette et au niveau de risque de remboursement des obligations. D représente alors le plus bas niveau (économie en défaut) et AAA le plus haut niveau (dette de première qualité). Plus la notation est élevée, plus le risque pris par les investisseurs est faible et plus le coût de financement de la dette est bas.
La situation de la France au sein de l’Eurozone
Les pays avec une note triple A comme la France, bénéficient de la confiance du marché et peuvent ainsi emprunter facilement de l’argent à des taux d’intérêt très faibles. Jusqu’à novembre 2011, la France empruntait de l’argent à moins de 3%, pour des échéances à 10 ans, ce qui est très faible. Aujourd’hui, sur fond de crise souveraine dans l’eurozone et de pressions des agences de notation pour que la France gère mieux son déficit, le marché commence à s’adapter aux nouvelles conditions et la France emprunte à 3.5%, se rapprochant dangereusement du niveau de 4%.
Un manque de confiance des investisseurs entraîne un cercle vicieux dont il est difficile de s’extraire. Les marchés font pression sur la France pour qu’elle réduise sa dette mais, ces pressions ont pour conséquence une hausse des coûts d’emprunt ce qui se traduit par un fardeau supplémentaire en termes de dette publique. Ainsi, dans le cas de la France, chaque augmentation du taux d’emprunt de 1% implique une augmentation des intérêts de la dette de près de 2.5 milliards d’euros par an ce qui rend encore plus difficile mais paradoxalement aussi plus urgente de nouvelles mesures d’austérité.
Si au cours des dernières semaines, l’écart de spreads entre la France et l’Allemagne, dont le taux d’emprunt sert de référence au sein de l’eurozone en raison de la bonne santé des finances publiques allemandes, s’est accentué, ce n’est rien comparé avec les cas de l’Italie ou de l’Espagne.
Afin d’enrayer cette machine infernale, deux solutions existent: soit que la conjoncture s’améliore, ce qui parait totalement exclu, soit que le gouvernement français s’oriente vers un troisième plan d’austérité, ce qui semble inévitable, en dépit du déni actuel des responsables politiques français. Dans tous les cas, si plan d’austérité il y a, celui-ci devrait arriver trop tard. Sans compter qu’il convient aussi d’appréhender la crise souveraine actuelle de la France, dans le cadre du contexte européen, ce qui laisse pessimiste sur les chances du pays de conserver sa note actuelle.
Les trois principales conséquences de la perte du triple “A” pour la France
Déjà, les pressions des agences de notation financière ont entraîné des pertes financières pour la France, via une chute des marchés boursiers, mais surtout, une hausse, encore faible, des taux d’emprunt du pays sur le marché obligataire. En cas de perte du triple “A”, les conséquences seront, évidemment, plus sensibles sur l’économie française.
Le durcissement de l’accès au crédit pour les entreprises et les particuliers
La première conséquence serait l’inévitable durcissement des conditions d’accès au crédit pour les entreprises et les particuliers car la dégradation de la dette de la France fera aussi monter tous les taux d’intérêts qui sont indexés sur les taux d’intérêt obligataires du pays. Concrètement, si les banques sont contraintes d’emprunter plus cher, elles prêteront aussi plus cher, que ce soit pour un crédit à la consommation, ou un crédit immobilier par exemple.
Un ralentissement de la croissance
Qui dit restriction de l’accès au crédit, dit aussi accentuation du ralentissement économique, dans un contexte qui n’est pourtant pas réjouissant, avec une croissance qui risque d’être atone pour au moins les deux années à venir.
Une hausse inévitable des taxes
Enfin, une dégradation de la note française se fera aussi ressentir au niveau fiscal. Dans un premier temps, les charges pour les collectivités deviendront plus fortes, le financement des dépenses publiques sera plus couteux et en conséquence cette augmentation de coût sera transmise aux particuliers via l’augmentation des impôts, ce qui entraînera un appauvrissement de la classe moyenne, à moins d’une vraie réforme de la fiscalité.